Communiqué n°20 – Les temps changent…
En 2011, Eva Joly, candidate d’EELV à la présidentielle, provoquait une vive polémique en proposant que le défilé militaire du 14 juillet fût supprimé, et remplacé par un « défilé citoyen » mêlant écoliers, étudiants, retraités, etc. Elle fustigeait l’image d’une France « guerrière » qu’elle souhaitait reléguer au passé.
Que n’avait-elle pas dit, alors ! L’ensemble de la classe politique s’était unie dans un seul mouvement cocardier pour condamner cette mauvaise patriote – étrangère de surcroît – qui avait osé toucher à la Sainte Armée de la si noble France tricolore. L’union sacrée nationaliste et militariste allait de la fasciste Marine Le Pen à Jean-Luc Mélenchon, défenseur de la « puissance française », en passant par la martiale Ségolène Royal et l’UMP sarko-buissoniste de l’époque.
Seules quelques voix issues de son parti s’étaient faites entendre pour la soutenir, comme Daniel Cohn-Bendit, José Bové ou Noël Mamère, qui critiquaient l’étalage guerrier du 14 juillet et l’invitation de dirigeants criminels (comme Bachar Al-Assad), au régime desquels ils comparaient d’ailleurs la France.
Aujourd’hui, on en est loin, très loin. Si Eva Joly et Noël Mamère sont plus ou moins en retraite politique, messieurs Cohn-Bendit et Bové ont rejoint, à l’instar de Yannick Jadot et d’EELV tout entière, la ligne militariste de l’OTAN et de la France qui s’y soumet, ce dont ce défilé aura été une illustration.
La guerre en Ukraine, dont la barbarie se poursuit évidemment encore (alors que certains avançaient l’idée que l’Ukraine l’emporterait vite sur une Russie mal équipée), aura été le triste révélateur de ce qu’est le monde politique français. Alors que quelques rares mais précieuses voix, s’élevaient des mois avant pour annoncer cette guerre, appeler à l’empêcher et à défendre une Ukraine à la fois libre et démocratique (ce qui n’était et n’est toujours pas le cas), c’est au bal des tartuffes auquel on a eu droit.
On a les nationalistes anti-OTAN et pro-Russie… mais qui n’ont pas réussi à affirmer leur ligne de manière ouverte et solide (l’échec d’Eric Zemmour en est une illustration) et qui, s’ils tiennent au fond le même discours qu’avant, se montrent plus timorés dans leur défense de la Russie. Il ne faut bien sûr pas considérer qu’ils soient hors-jeu définitivement. Le discours nationaliste-antiaméricain a encore de quoi prospérer dans notre pays, habitué à ce genre de discours populiste et pseudo-anticapitaliste (les Etats-Unis étant l’incarnation d’un capitalisme idéalisé), qui mène irrémédiablement au fascisme.
On peut également joindre à ce groupe, principalement d’extrême-droite ou de droite dure, la France insoumise de Jean-Luc Mélenchon. Ce dernier, pourfendeur des « yankees », soutien du régime chaviste pro-Russe, défenseur de l’invasion de la Crimée et des horreurs poutiniennes en Syrie, toujours premier à défendre la grandeur française et la puissance de son armée, n’hésite pas aujourd’hui à se faire passer pour un défenseur de la paix et de l’Ukraine, en faisant passer un genre de « ni-ni » – au demeurant bien silencieux sur l’OTAN – pour du pacifisme.
Mais il y a également un groupe non moins détestable quoiqu’il soit à l’origine mû par des principes supposément moins odieux que ceux du camp nationaliste. Il s’agit de ces défenseurs autoproclamés de l’Ukraine qui pourtant ne s’en souciaient pas avant la guerre et qui veulent faire passer un soutien total à son régime ultra-nationaliste et ultra-corrompu, ainsi qu’un alignement total sur les Etats-Unis et l’OTAN pour une défense de l’Ukraine. Champions de la récupération et de l’hypocrisie, ils font des parallèles avec Srebrenica ou avec la Seconde guerre mondiale, pour justifier leur bellicisme supposément humaniste.
On notera au passage qu’EELV, qui défend de plus en plus la GPA et la prostitution, s’aligne totalement sur l’horreur que connaissent les ukrainiennes, dont la prostitution en Europe est entretenue par les proxénètes de tout poil (et l’odieux STRASS français, en bon termes avec EELV), et dont le pays est devenu un pourvoyeur de ventres pour les occidentaux qui exigent un enfant, en bon petits consommateurs, et qui préfèrent louer une femme exploitée plutôt que recourir à l’adoption.
A qui feront-ils croire qu’on peut défendre l’Ukraine en y défendant la corruption (le président Zelensky, financé par les oligarques est lui-même un champion des comptes off-shore), le nationalisme (Yannick Jadot n’hésitant pas à reprendre les slogans de l’extrême-droite ukrainienne), et en assumant de faire de l’Ukraine la base de la guerre que comptent mener les Etats-Unis et leurs vassaux contre la superpuissance russe, qu’ils désirent abattre et dépecer avant d’affronter leur grand concurrent qu’est la Chine ?
Car c’est bien de cela dont il s’agit. L’OTAN entend constituer une « force de réaction » de 300 000 soldats, assume de considérer la Russie et la Chine comme ses ennemis principaux, tandis que l’état-major britannique parle ouvertement de guerre contre la Russie et que la France assument son implication totale dans le conflit. On songera aussi à Lech Walesa, certes figure ouvrière mais historiquement aligné sur le Vatican et les Etats-Unis, qui dit ouvertement que la Russie doit être dépecée, et divisée en petits morceaux, et que c’est le rôle de l’OTAN (et de l’UE qui lui est soumise) d’accomplir cette tâche.
On en est revenu à l’opération « Unthinkable » que l’état-major britannique avait envisagée, à la sortie de la seconde guerre mondiale : un projet de « guerre totale » pour changer le régime russe (soviétique, à l’époque) et dépecer cet immense Etat au profit des intérêts économiques de l’Empire britannique. Tout est dit dans le nom : unthinkable/impensable. Impensable de barbarie. Et pourtant, nous y voilà : l’impensable est là et se met en place peu à peu. Face à cet impensable, il serait justement impensable de ne pas prendre position. Quand approche le cataclysme, on ne peut se contenter d’un « advienne que pourra ».
Au fond, nous l’avons déjà dit, la ligne est simple : guerre à la guerre. Cela implique, en France, pays capitaliste de plus en plus à la traîne et désormais totalement imbriqué dans la guerre pilotée au niveau de l’OTAN, de s’opposer à ceux qui se complaisent dans la propagande belliciste, dans le recyclage de l’union sacrée, mais au niveau européen. Il faut assumer la rupture avec l’OTAN et sa ligne, sans pour autant s’aligner sur les défenseurs de la Russie. Refusons de sacrifier les peuples d’Europe de l’est (qu’on a fièrement fait parader aujourd’hui) et en priorité le peuple ukrainien. Car ce sont bien eux qui pâtirons d’une guerre telle que l’OTAN l’assume de plus en plus. Ces gens ne défendent plus ni la fin de la guerre, ni même la simple victoire de l’Ukraine, mais bien une guerre d’un niveau supérieur entre tout le bloc occidental guidé par les Etats-Unis et la Russie… sans oublier la Chine, déjà désignée comme prochaine cible. De leur côté, ces Etats sont sur la même ligne : la Russie s’en prend à l’Occident tout entier, et la Chine continue d’accumuler des forces et de se préparer pour les conflits à venir.
Et le peuple ukrainien, dans tout ça ? Tout le monde s’en moque. Les uns voudraient qu’il abdique et devienne une colonie de la Russie qui veut renforcer son bloc pour mieux affronter le grand concurrent étasunien. Les autres veulent bien le débarrasser de l’armée russe, mais à la condition que le pays soit un point d’appui pour les conflits de l’OTAN, et qu’il continue de baigner dans le nationalisme et la corruption.
Les pseudo-partisans de la paix et de la démocratie qui se sentent prêts à la guerre nucléaire ne valent pas mieux que les dictateurs fascistes qu’ils prétendent combattre. Il en va de même pour les pseudo-pacifistes qui défendent simplement la Russie de manière insidieuse.
A l’heure où les uns et les autres redoublent d’agressivité et assument de vouloir plonger la planète dans une troisième guerre mondiale qui, de fait, a déjà commencé à bas bruit, il faut assumer la rupture. Les mots d’ordre sont les mêmes : Guerre à la guerre ! Vive l’Ukraine indépendante et démocratique ! Vive l’amitié entre les peuples !
Voilà ce pour quoi il faut combattre aujourd’hui.