L’avenir auvergnat vu par Europe Ecologie – Les Verts.

Tandis que certains commencent à se hausser du col en vue de l’élection présidentielle prochaine, nombreuses sont les organisations politiques qui préparent une échéance plus proche : les élections régionales. En Auvergne (et Rhône-Alpes, évidemment), l’enjeu est simple : il s’agit de déloger la majorité sortante de droite, menée par l’insupportable Laurent Wauquiez.
C’est dans ce cadre qu’Europe Ecologie – Les Verts a publié une tribune sous forme de pétition à signer, selon la forme consacrée dans cette gauche-là, pour se poser comme moteur d’une nouvelle majorité écologique.

Tout ce qu’on peut y trouver relève du classique pour la gauche libérale représentée par EELV. Il faudrait « consommer local » dans un fétichisme de la petite production. Pour eux, « ne laisser personne au bord du chemin » tient plus à inclure tout un chacun dans la machine capitaliste écolo, à exiger de tout le monde de « faire l’effort » de consommer plus juste et travailler plus vert, que d’impliquer tout le prolétariat dans la construction d’une nouvelle société dirigée par lui. Ils souhaitent que l’Auvergne devienne « une région verte qui […] s’engage dans la sobriété ». Lorsqu’on connaît la Gauche historique et la gauche libérale, on sait bien que derrière le terme « sobriété » se cache en réalité le terme « décroissance », un concept anti-gauche et issu d’un fantasme petit-bourgeois d’un monde où le capitalisme aurait un visage humain. On retrouve là les fondements du proudhonisme, avec sa dénonciation du grand capital et sa glorification du petit capitalisme, vu comme « éthique » et vers lequel il s’agirait de retourner, pour échapper aux monopoles qui détruisent tout. Ils veulent une région qui « investit dans l’éducation de sa jeunesse », mais à aucun moment ils ne précisent de quelle éducation il s’agit, sur la base de quelles valeurs morales et culturelles il s’agirait de la bâtir… Ce qui révèle, comme toujours, un fond politico-culturel creux, vide, et parfaitement oubliable. Mais qu’attendre d’autre d’un parti qui voudrait « Réorienter les politiques publiques » ? L’aspect bobo se positionnant comme nouveau gestionnaire du capitalisme français est on ne peut plus visible…

Ce qui est étonnant (ou pas, lorsqu’on connaît EELV), c’est qu’à aucun moment les sujets de fond de l’écologie ne sont abordés. A aucun moment le texte ne remet en cause la chasse et les chasseurs comme figures passéistes et brutales de restes de féodalité ayant fait leurs temps. Pourtant, vue la quantité de plomb qu’ils enfouissent dans la terre, il y aurait de quoi critiquer lorsqu’on souhaite la protection de la Biosphère terrestre. Pas un mot sur le fait que les hommes fassent d’ailleurs partie de cette Biosphère terrestre, et ne flottent pas au dessus comme des maîtres de la Nature… Pas non plus un seul mot sur l’élevage, qui génère pourtant une quantité de pollution de l’air absolument intolérable… Pas un mot sur le bétonnage des zones humides… Et surtout, pas un mot sur la question de la souffrance animale et le sujet du véganisme ou du végétarisme, qui régissent pourtant toute la question écologique à notre époque. EELV étant un parti de libéraux qui ne souhaitent que « gérer » le capitalisme français de manière décroissante, et non pas le dépasser comme nécessité historique, comme passage dans une nouvelle époque où la société pourrait réellement changer, il n’est donc pas surprenant de les voir passer à côté de la dignité des animaux, et finalement, à côté de l’écologie. On ne retiendra donc d’EELV qu’à part beaucoup de prétention, le fond est à la hauteur du plafond. Tout cela n’a aucune envergure, aucune profondeur, aucune dignité… Pourtant en Auvergne, région du fromage, de la charcuterie et de la ruralité profonde, il y a clairement des positions fermes à prendre pour contrer les positions adverses qui, elles, ne manquent pas de fermeté. Des libéraux comme à EELV ne sauraient tenir la distance face aux coups portés par des réactionnaires de plus en plus agités, de plus en plus paniqués et prêts à tout pour ne pas terminer aux rebuts.

EELV n’avance pas ici seule mais accompagnée de toute une « galaxie écolo » dont c’est peu dire qu’elle ne fait pas rêver. On trouve tout d’abord Génération écologie, l’historique sœur ennemie, liée à la droite (au Parti radical, plus précisément) et dont la nouvelle dirigeante, Delphine Batho, éphémère ministre et transfuge de la gauche qu’elle renie désormais, tente de faire la figure de proue d’une « écologie » qui se suffirait à elle-même, comme une troisième voie « ni socialiste ni libérale » qu’elle nomme « écologie intégrale ». Une écologie anti-socialiste qui critique les excès du libéralisme sans toucher aux fondements de la société capitaliste… On voit bien où cela mène. On retrouve également l’Alliance écologiste indépendante, fondée par Jean-Marc Governatori, millionnaire de droite qui a enregistré à l’INPI une quarantaine de noms de partis, dont « La Droite républicaine » et « Union droite républicaine ». Sans parler du lien entre certains militants de son parti et des sectes (Krishna, Scientologie, Moon, Raël). Puis vient CAP21 – Rassemblement citoyen, mené par l’ancienne ministre RPR Corinne Lepage, qui a soutenu Emmanuel Macron en 2017. C’est ensuite au tour du Mouvement des progressistes, fondé par l’inénarrable Robert Hue, soutien de la première heure d’Emmanuel Macron, après avoir été hollandiste, et dont l’héritier Sébastien Nadot se prend pour un rebelle pour avoir quitté la majorité sur la pauvre question du budget.
Et puis il y a Génération.s, dont la présence ici témoigne de son échec politique. En quittant le Parti socialiste, Benoît Hamon avait suscité un intérêt chez beaucoup de gens, et Gs aurait pu devenir une force de gauche assez importante… à condition de clairement choisir sa ligne. D’un côté, Benoît Hamon disait ne pas vouloir quitter le socialisme, parlait de bourgeoisie qu’il désignait comme classe à laquelle s’opposer, et plaçait l’écologie comme émanant de la Gauche, niant l’idée qu’elle puisse être « ni de gauche, ni de droite ». De l’autre, il restait un rocardien s’adressant à la petite-bourgeoisie urbaine, avec son revenu universel, son relativisme culturel, ses points médians, son européisme béat. Cette contradiction ne pouvait tenir et, faute d’assumer la première dimension et de se tourner vers les masses, Gs s’est trouvé dans une impasse. Voilà donc que ce parti capitule et se soumet à EELV et son rejet de la gauche, se croyant le moteur d’une « vague verte »… suite à un score de 13% dans une élection à l’abstention élevée et où les Verts n’ont obtenu des bons scores qu’auprès des bobos de centre-ville.

Le monde fait face à une crise capitaliste d’ampleur jamais égalée depuis les années 20… En France, il apparaît clairement qu’EELV n’est pas à la hauteur de notre époque, et ne saurait être le moteur mobilisant les masses dans la défense de la Biosphère et dans le dépassement des vieilles mentalités. EELV est un parti purement capitaliste, et ne peut donc proposer qu’une fuite en avant en modernisant ce mode de production moribond. A la Gauche historique de s’emparer de la question, elle seule étant capable de la porter.

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