Deux nouvelles victimes de la gestion capitaliste de l’hôpital
Au CHU de Clermont-Ferrand, la tension hospitalière s’est exprimée de manière particulièrement violente : une médecin et un ambulancier qui travaillait au SAMU se sont suicidés ce mois-ci. Impossible de ne pas y voir une conséquence des conditions de travail déplorables que connaissent les soignants, en particulier en ces temps de crise.
De fait, l’ambulancier, qui travaillait au CHU depuis 32 ans, avait été en conflit avec sa hiérarchie depuis au moins huit mois et avait même été mis à pied suite à une altercation avec son supérieur. Ses collègues témoignent aujourd’hui d’une forte dégradation de l’atmosphère au sein de l’hôpital. Ils évoquent également les nombreuses alertes de la médecine du travail et demandent l’arrêt des pressions. En effet, la tension est montée, pour ce qui est des ambulanciers, après une réorganisation de leur travail, dans un esprit très « managérial », on l’imagine. Ils mentionnent de nombreux collègues « en souffrance » ou même directement en arrêt, qui subissent ces changements « à marche forcée », eux aussi. On retrouve la même logique « managériale » cynique et abjecte pour le cas de l’autre malheureuse victime, dont le bureau avait été entièrement vidé en son absence.
Bien évidemment, ce n’est pas un problème spécialement clermontois, ou simplement ponctuel. La tendance est générale, ainsi que l’explique Eric Henry, président de l’association des soins aux professionnels de santé, dans son entrevue avec le magazine Marianne où il nous rapporte les dires d’une soignante d’Ehpad : «Je ne sais pas si je dois encore me battre pour mon métier ou mourir pour laisser un témoignage poignant». Il estime le nombre de suicides dans le monde de la santé à deux ou trois par jour. D’ailleurs une étude de l’InterSyndicale Nationale des Internes précise que 66% d’entre eux souffrent d’anxiété, 27% de dépression et 23% ont déjà eu des idées suicidaires. Son témoignage est accablant : « A 25 ans, ils sont déjà brisés et épuisés professionnellement car ils font trop d’heures de gardes interminables. Normalement, le maximum c’est 24 heures d’affilées, mais la plupart restent 48 heures voire 72 heures sans rentrer chez eux. Ils sont à la merci de leur chef et deviennent corvéables à souhait, sous prétexte qu’ils sont de futurs médecins et qu’ils vont sauver des vies. Cette mentalité doit cesser, quitte à mettre des contrôles de police dans les établissements qui ne respectent pas les heures de travail. »
Il n’y va pas par quatre chemins : pour lui, cette situation découle des économies faites sur le dos de l’hôpital public. « En réalité, dit-il, on a brisé des vies pour faire des économies d’échelle. ». Voilà un beau résumé du capitalisme, et l’on comprend que les protestations du personnel hospitalier s’insèrent dans le cadre de la lutte des classes, de la lutte pour une nouvelle société, collective et ne laissant personne de côté.
Il apparaît donc impératif que la Gauche se reconstruise et soit en mesure d’influer et même de diriger la société. On n’a pas besoin d’une simple gestion plus sociale de l’hôpital dans un cadre capitaliste. C’est ce cadre qu’il faut faire sauter. Le désespoir des soignants doit nous interpeller comme une affirmation d’un besoin de collectivité, d’humanisme universel, en bref : de socialisme.